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Culture  and  Co

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Musique, Théâtre, Littérature, Cinéma, Entretiens avec des artistes.


MONIQUE BRUN : L'ENTRETIEN

Publié par Le BLOG de Fabien LIZE sur 4 Février 2017, 22:15pm

Catégories : #culture

Photo de Monique Brun par Monika JEZIOROWSKA

Photo de Monique Brun par Monika JEZIOROWSKA

Monique BRUN est pour moi une très grande comédienne. Sa façon de travailler me touche particulièrement. Ses spectacles sont d’une grande humilité et sont « intelligents ». Il y a du sens et du fond dans ses créations. C’est profond.

C’est à la suite de son dernier spectacle « Leo 38 » (évocation à partir d’entretiens, du parcours de Léo Ferré) que j’ai souhaité l’interroger sur son propre parcours.

Voici donc ses réponses à mes questions.

 

 

J'ai vu plusieurs spectacles de toi et à chaque fois tu es très proche du public (là je parle de distance). Quel est justement ton rapport au public ?

 

Écoute, longtemps au théâtre j’ai joué dans des grandes salles, pendant une trentaine d’années.

Puis j’ai été attirée par un autre rapport au public et le hasard, s’il en est, m’a fait rencontrer le Théâtre Dromesko – un théâtre itinérant (ou c’est en faisant cette rencontre que ce désir m’est venu bref, ça s’est fait). Pendant dix ans je me suis retrouvée sur les routes, mais plus dans des hôtels. On habitait des caravanes (un camion pour ma part) et voilà que quelque chose s’inversait. Les spectateurs étaient accueillis sous les chapiteaux de Dromesko, comme dans une maison, la même où que ce soit, du coup. Qui plus est, aucun spectacle de Dromesko ne se termine sans qu’un verre soit offert. De fait, toute personne qui désire s’éterniser un peu est la bienvenue. C’est là je crois que j’ai mesuré ce qu’était la proximité et ce qu’elle engendrait. Il n’a plus été question pour moi de « revenir en arrière ». Et donc, je suis allée un peu plus loin. Quand j’ai imaginé Léo 38, ce spectacle construit à partir des interviews de Léo Ferré, j’ai souhaité (ce que je n’avais jamais fait) aller chez des gens, dans leur maison ou dans des lieux où nous serions peu nombreux.

Il s’agissait dès lors de franchir un autre un cap, à savoir celui de la confidence, les yeux dans les yeux. Plus réellement de spectacle en quelque sorte. Enfin, plus ce que l’on entend par spectacle… C’était il y a déjà six ans.

 

Quel serait ta définition d'une "bonne comédienne" ?

 

Je ne sais pas. Je crois que, quelle que soit la nature de l’exercice, théâtre (classique ou non), chant (lyrique ou pas), je suis touchée quand une expression ne ressemble à aucune autre. Quand je suis étonnée et troublée (souvent par une sincérité renversante) quel que soit le registre. C’est comme la présence. C’est un mystère. Et quand ça triche ça se voit. Enfin, je le vois, et ça ne m’intéresse pas, même si la prestation est brillante. C’est compliqué. La sincérité ne suffit pas toujours non plus… Bref, quand c’est vraiment personnel et de préférence énigmatique, ça me plaît.

 

Tu chantes souvent sur scène, aurais-tu aimé faire une carrière d'interprète ?

 

Oui je crois vraiment que c’est ce que j’aurais aimé.

 

Pourquoi un spectacle sur Léo Ferré et quelle est sa place dans ton parcours personnel, s'il en a une ?

 

En 2007, je me suis trouvée embarquée pour trois soirées de concert avec des chanteurs et musiciens. Là, un Monsieur du nom de François André (fondateur de la revue Les Copains d’la Neuille, revue toute entière consacrée à « l’actualité de Léo Ferré ») est venu me trouver gentiment en me demandant si je songerais à chanter Léo Ferré… Je n’y songeais pas. Au fil du temps, (nous étions restés en contact) sa discrète mais tenace intuition a fini par encourager l’envie de répondre à cette sollicitation. Par respect aussi à une si fidèle conviction de sa part (qui restera pour moi un mystère) j’ai finalement réalisé Léo 38, quatre ans après notre première rencontre.

J’avais vu Léo Ferré sur scène en 1969. Puis en 1984. Je l’ai aimé beaucoup mais je n’étais pas à proprement parler une inconditionnelle. En revanche, je le suis devenue en plongeant dans ce travail.

Et je me suis confronté à un autre désir, celui du chant a cappella (on en revient au désir de proximité).

 

Comment écris-tu un spectacle ?

 

Un peu comme tout ce que je fais. Je laisse se bousculer les intuitions (je leur fais confiance), dans le désordre, sans m’en effrayer. Je laisse passer du temps. J’y reviens. Je ne nomme pas ce vers quoi j’avance, souvent sans le savoir. Lentement, comme à mon insu, ça se construit. Et quand c’est fini, je découvre à quel point c’est construit. Et à quel point je voulais bel et bien aller quelque part.

 

Pourquoi es-tu devenue comédienne ?

 

Mon père faisait du théâtre en amateur et j’avais quatre ans quand j’ai commencé à le voir jouer. À cette époque il y avait encore des théâtres à l’italienne, avec rampes (les fameux feux de la rampe), des planchers qui craquaient, des odeurs et tout un tas de rituels qui me fascinaient.

Il n’en fallait pas plus pour alimenter un rêve.

Sauf que je l’ai réalisé.

Je vais te confier aussi une chose : j’avais huit ans et des poussières la première fois que je suis entrée sur une scène (celle du théâtre qui m’avait fait rêver).

Je me souviens ne pas avoir eu peur. En découvrant tout ensemble la très vive lumière de la rampe et le silence particulier qui bruissait dans le noir de la salle, j’ai éprouvé un indescriptible sentiment de liberté.

 

 

Dans ton métier quelles sont tes plus belles rencontres ?

 

Toutes et chacune. J’ai l’impression que chacune arrive à point nommé, comme une chance de plus.

 

Un de tes spectacles "Ascolta" m'a beaucoup touché peux-tu m'en décrire l'origine ?

 

Oui. La mort me hante beaucoup. Il faut dire qu’autour de moi, les départs (annoncés ou non) se sont multipliés. À un moment donné, j’ai éprouvé une angoisse beaucoup plus forte que d’autres (des morts à venir semblaient se préciser) et ma manière d’y faire face a été de me pencher sur ce projet de spectacle qui à l’arrivée est tout autant un hymne à la vie.

Toi qui l’as vu, tu ne trouves pas ?

Nommer la mort c’est vraiment nommer ce que la vie a de rigoureusement précieux, non ?

Et puis il y avait cette histoire de peinture… Ce texte splendide de John Berger, celui qu’on entend en voix off et qui structure finalement ce spectacle, qui nous parle de la trace.

Ainsi j’ai pu vivre encore une nouvelle histoire de théâtre.

En étant « au présent », absolument et nécessairement, en train de peindre tout en m’adressant aux spectateurs.

 

Quel est ton projet le plus fou ?

 

Je ne sais vraiment pas Fabien.

Ah… Peut-être construire une yourte devant ma maison pour y jouer tous mes spectacles et en accueillir d’autres… à la carte !

 

Peux-tu tenter de me décrire ce que tu ressens sur scène ?

 

C’est une espèce d’évidence. Je suis là. C’est prévu. Je le fais. Ah je sais !! Là au moins je ne fuis ni ne reporte au lendemain ce qui doit être fait. Et c’est à chaque fois une belle victoire !

.

 

 

…………………………………………………………………………………….

Comme le veux ma coutume lors de mes entretiens je demande à mon « invitée » de bien vouloir me poser une ou deux questions. Voici donc celles de Monique Brun.

 

 

Te souviens-tu de ta première émotion artistique ?

 

Je l’évoque souvent mais je la dois à ma grand-mère maternelle. Il y avait chez elle des 33 tours. Tu sais, ces objets qui servaient à écouter de la musique… J’en ai mis un de louis Armstrong (je devais avoir 5 ans) et là "je me suis pris une claque" J’ai tout de suite eu envie d’imiter sa voix et, elle à tout de suite également résonné en moi très joyeusement. C’est là que je suis tombé amoureux du jazz je pense. Et je le suis toujours. Je suis fidèle en fait !

 

Comment (et peut-être pourquoi) as-tu choisi le métier que tu fais ?

 

Pourquoi choisir le social ? Parce que oui tu as raison en ce qui me concerne c’est vraiment un choix. J’ai envie de te répondre parce que j’aime les gens et la vie et que je voulais faire un métier utile. Enfin...selon mes valeurs. Parce que oui un commercial peut te dire que son métier est utile et pourquoi pas ! Mais pas pour moi.

Alors pour moi l’insertion professionnelle ça a été ça! Donner du courage ou de la bonne humeur aux autres c’est relativement essentiel en ce qui me concerne. Mais je dois t’avouer que ton métier ne m’aurait pas déplu. Avec la même envie d’apporter aux autres.

 

 

 

 

 

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C
De bonnes informations, merci pour cet article
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